samedi 5 décembre 2015

MA CHÉRIE

 Ma chérie.
Nos cœurs serrés,
Les larmes dans les yeux,
L’impuissance nous oppresse.

Ma chérie,
Nous avons mal.
De te voir souffrir.
De te voir douter,
De te voir dans la peur.

Ensemble,
Main dans la main.
Nous t’emmenons dans le ciel.
Flirter avec les étoiles.
Caresser la lune.

Ensemble,
Sur cette Voie lactée
Nous avançons,
Nous reculons,
Nous luttons.

Demain,
L’espoir dans les yeux,
Nous, nous retournerons.
Nous voyagerons,
Main dans la main

Demain
Ensemble
Nous t’emmènerons
Sur le chemin
De ton destin.

Ma chérie
Nous t’aimons.
Ensemble, nous gagnerons.
Nos cœurs légers,
Les yeux émerveillés.


Isabelle THEROND




samedi 28 novembre 2015

ENTRÉE EN RÉSISTANCE

 Paris, Tunis, Bamako et bien d’autres.
La terreur s’est abattue.
Des corps meurtris de part et d’autre.

L’innocence est volée.
Les larmes coulent sur les visages.
L’insouciance est brisée.

Mais renait l’espoir.
Le jeu de cartes n’est pas jeté
Face aux actes attentatoires.

Chacun d’entre nous,
Faisons un entrechat.
Notre liberté est un bijou.

Une bougie dans la main,
Notre force est notre culture.
La tolérance gagnera demain.

Livre, musique, amusement
Sont nos armes.
Résistance par le boucan.

La peur ne nous écrasera pas.
À la lumière des bougies,
Force, elle deviendra.

Isabelle THEROND

samedi 21 novembre 2015

Tisseuse d’avant, tisseuse d’aujourd’hui

Me voilà au côté de cette ouvrière. Dame d’âge mûr, au visage marqué par le temps.
Visage rond, rempli de patience, mais d’exigences. 
Une exigence pour un travail bien fait.
À travers ses doigts, meurtris par ses gestes répétitifs, ces fils multicolores circulent au rythme de la machine.
Cadencée par des clics, des clacs, des taps, et des swings, cette main file, passe, bloque, coupe.
Ce fil s’entremêle, se transforme et donne cette belle Levantine.
Devant cette mutation, les bruits de l’atelier se font discrets.
Admirative devant la grâce de cette ouvrière, j’apprécie et j’envie sa sérénité, sa dextérité, sa créativité.
De ses mains rugueuses, difformes, nait une œuvre qui réchauffe tout mon être.
J’imagine cette étoffe qui ensoleille la chevelure folle d’une fillette.
Ou encore éclaire la beauté de cette métisse des îles chaudes du pacifique.

Pragmatique et consciencieuse, cette ouvrière me ramène à la réalité.
Soucieuse de mon apprentissage, elle m’incite à m’essayer.
Je doute face à son savoir, face à l’immensité de la tâche.
Son invitation à produire ces gestes me paralyse.
Consciente de ma peur, elle me rassure avec ses mots pleins de sagesses.
Soulagée, de ma main fébrile, je saisis les fils.
Mais là, tout va vite, la panique m’envahit.
Mais cette main du savoir vient à ma rescousse et m’accompagne.
Devant moi, ma création prend forme avec toutes ses imperfections.
Ravies sans être satisfaite je découvre mes capacités.
D’un coup retentit la sonnerie de fin de journée. Les machines s’arrêtent, s’en suit le brouhaha des ouvrières, pour laisser place au silence de l’atelier.

J’imagine, derrière ces portes closes, le murmure d’une mélodie qui clôture le travail des passementières.

Isabelle THEROND

dimanche 18 octobre 2015

Mon papa à moi !


Moi, je suis Mélissa ! Avec mon papa à moi, le soir, je pars mettre la clôture.
Papa, il conduit le gros tracteur rouge.
J’aime bien être dans le tracteur. Même si je me cogne la tête à cause des trous sur le chemin.
On arrive au pré, oh, là, là ! Mon papa à moi, il est fort ! Il porte tous les piquets sur son épaule.
Ensuite, il accroche le fil dessus. Et moi ! Je l’aide à porter la grosse bobine bleue.
Le fil se tend, il brille. Des fois, il s’emmêle sur les pics du fil de fer. Il est long, il fait tout le tour du pré.

Pouf!...Moi maintenant, je suis fatiguée

Isabelle THEROND

Éphémère voyage

Je suis assise devant ma fenêtre, face au spectacle que la nature m’offre.
Dehors, de gros nuages gris envahissent le ciel. La lumière du jour s’estompe pour laisser place à l’obscurité de la nuit.
Les cumulus s’entrechoquent dans un vacarme assourdissant. Le ciel gronde et les éclairs illuminent le jardin.
Je sursaute, je tressaille à chaque coup de tonnerre, mais reste admirative devant la beauté du ciel.
Le vent gronde dans la cheminée. Chaque rafale agite bruyamment la fenêtre. La pluie battante s’abat sur la grande baie vitrée.
Les gouttes d’eau explosent violemment sur la vitre, accompagnées d’un désordre sonore.
Une fois éclatées, ces perles d’eau se dispersent de part et d’autre. Chaque gouttelette s’accompagne d’une multitude de filigranes qui ornent d’une toile fine et éparse, ce fond gris orageux du ciel.
Les cliquetis de la pluie, les sifflements du vent accompagnent en concert ces sillons d’eau qui s’illuminent de lumières jaune, orange et rouge et tapissent cette œuvre éphémère.
Puis, cette exposition singulière qui m’est offerte s’évapore paisiblement pour laisser place à la quiétude d’un crépuscule d’été.
Doucement, sereinement, je m’extrais de cette féérie pour renouer avec ma réalité.
Mais quel beau voyage dans la suspension du temps !

Isabelle THEROND

samedi 10 octobre 2015

Les Kodiaks : ces masques des émotions

Lola, du haut de ses 8 ans, avec son visage tout rond et son regard espiègle, avance dans la rue à grands pas. Elle revient de l’école, avec sur son dos, son cartable sur lequel est imprimé un arc-en-ciel traversant un miroir. Elle avance un pas décidé, sans voir ce pauvre chat dont elle a presque écrasé la queue. Elle marche vite effleurant de près les lampadaires qui commencent tout juste à s’allumer. C’est la fin de la journée et la nuit vient très tôt en cette période d’hiver, malgré son ciel étoilé et son croissant de lune.
Lola n’a qu’une obsession en tête, « qu’y a-t-il derrière cette porte ? »
À son réveil, ce matin, elle a entendu sa maman chercher une clé. Il paraît qu’elle permet d’accéder au grenier. Sa mère a même dit « vouloir faire du rangement ». Mais qu’est-ce qu’il y a dans ce grenier ? Pourquoi Lola n’en avait jamais entendu parler ? C’est vrai, il y a cette porte, au fond du couloir du dernier étage, qui est toujours fermée. Lola ne l’a jamais vue ouverte et ne s’est même jamais demandé ce qu’il y avait derrière.
À peine arrivée chez elle, Lola jette par terre cartable et blouson. Elle quitte au milieu du palier ses chaussures et court vers le tiroir de ce vieux buffet en chêne. Elle sait qu’elle n’a pas beaucoup de temps, ses parents reviennent du travail dans une heure. Le tiroir est lourd, mais elle aperçoit la clé. C’est une grosse clé - comme celle des châteaux, - à laquelle est accrochée une étiquette où il est inscrit d’une encre bleue à moitié effacée : « grenier ». Vite, Lola, la saisit et court au deuxième étage de cette ancienne maison bourgeoise du XIXe siècle. Toute chancelante, elle engage cette grande clé dans la serrure, la fait pivoter et tourne la poignée ronde de la porte.
Lola est tout excitée, que va-t-elle découvrir ?
Elle pénètre dans une grande pièce, sombre. Tout le long des murs, il y a des étagères sur lesquelles sont empilés des tas de cartons de couleurs différentes. Des inscriptions sont notées dessus, mais Lola n’arrive pas à les lire, il y a trop d’obscurité. Au centre de la pièce, une lumière sortant d’une faitière illumine un grand miroir et un coffre. Le miroir est orné d’un cadre en bois sur lequel sont sculptés des visages. À côté se dresse un grand coffre en bois, comme dans les histoires de chasse au trésor. Lola chancelante, intriguée et hésitante s’approche de ces objets. Tout paraît étrange et fantastique à la fois.
Elle s’accroupit devant le coffre et décide de l’ouvrir. Surprise ! elle y découvre à l’intérieur des masques blancs, des masques neutres, sans expression, sans fantaisie. Lola ne comprend pas, elle ressent de l’inquiétude. Mais la curiosité plus forte que sa peur, l’invite à se saisir d’un des masques.
Tout en l’approchant de son visage, elle ressent comme une envie de pleurer. Une fois le masque posé sur son visage, elle se retourne face au miroir, eh là ! elle découvre un visage exprimant la peur. Effrayée, elle retire d’un mouvement brusque le masque et le dépose à côté du coffre. Son cœur bat à cent à l’heure.
Troublée, d’une main tremblante elle saisit un second masque. Comme pour le précédent, elle ressent en elle de drôle de sensation, comme une sorte d’excitation avant de découvrir un cadeau. Dès qu’elle met le masque, elle se tourne à nouveau en direction du miroir, et stupéfaction ! Elle découvre un visage exprimant la surprise, l’étonnement.
Plus sereine, elle pose délicatement ce second masque à côté du premier. Et voici que Lola essaye masque après masque et découvre une multitude d’émotions : la joie, la tendresse, l’amour, la colère, la honte, etc.
Tellement captivée par sa découverte Lola n’entend pas sa mère arriver :
  • Tu les as trouvés ! dit-elle. C’est que tu es prête alors.
Lola se retourne dans un soubresaut
  • Prête ? Prête pour quoi ?
Comprends-tu ce que tu viens de découvrir ?
  • Ce sont des masques d’émotions. Des masques magiques ? C’est ce qu’on appelle des Kodiaks ?
  • Oui, mais as-tu une idée à quoi ils servent ?
  • Non !
  • Ces masques permettent à la gardienne des émotions d’aider les enfants qui ne comprennent pas ce qu’ils vivent…
  • La gardienne des émotions ? C’est qui ?
  • Eh bien ! Ma petite Lola chérie, maintenant la gardienne c’est toi.
  • Moi ? Mais je ne sais pas…
  • Non, tu ne sais pas encore comment t’en servir. Mais tu vas apprendre. Maintenant, chaque fois qu’un enfant ressent des émotions en lui, mais qu’il n’arrive pas à les comprendre, tu seras là pour l’aider.
  • Je ne comprends pas ?
  • Eh bien ! pour exemple, regarde le miroir.
Lola se retourne et découvre dans le miroir une petite fille dans un lit d’hôpital. Sa mère reprend :
  • Tu vois cette petite fille, elle est malade et à l’hôpital.
  • La pauvre !
  • Oui, la pauvre. Aujourd’hui elle a peur, très peur, mais elle n’arrive pas à l’exprimer. Elle ne comprend pas ce qu’il lui arrive. Ses parents sont auprès d’elle, mais ils ne savent pas quoi faire, quoi lui dire. Ils ont tous les trois très peur.
  • Oui, et alors ?
  • Eh bien toi, avec les masques tu vas les aider à exprimer leurs émotions, comme leur tendresse, leur amour, leur courage pour que cette famille arrive à surmonter cette épreuve.
  • Mais comment est-ce que je vais faire ? demande Lola.
  • Eh bien ! c’est là que tu vas apprendre la magie des émotions ma petite gardienne.
Isabelle THEROND